Enjoy or not!
Luxa
Simon attendait depuis une heure
maintenant. Il n'y avait que deux clients devant lui. Il n’avait
pas à se plaindre, d'ordinaire, la file d’attente pour
recevoir la nouvelle carte d’identité dépassait
allègrement les deux heures. Pourtant, l'opération
semblait simple: le guichetier prenait la carte, la passait dans un
lecteur optique et elle redevenait valide pour trois ans. Simon
s’était toujours demandé pourquoi la file d’attente
était si longue alors que l’opération si courte.
L’homme
devant lui était maigre. Il transpirait de pied en cap comme
si la peur le tétanisait. Quand il se présenta au
guichet, il donna sa carte d’une main tremblante que ne manqua pas
de remarquer l'homme derrière sa vitre. La scène dura
quelques instants. Le maigre n’entendit que son cœur battre
jusqu'à ce qu'on lui rende sa carte. On le remercia d’être
venu et on lui souhaita une bonne journée. Quand il se tourna
Simon lut le soulagement sur son visage tandis que lui-même
songea.
Un puissant « bonjour
monsieur » le ramena à la réalité. Il
s’avança en s’excusant. L’homme derrière la vitre
portait un uniforme vert foncé sur lequel on pouvait voir
le logo rouge de Edax. C’était la société
privé qui s’occupait du renouvellement de la carte
d’identité des citoyens de Luxa . Elle avait passé un
accord exclusif avec le gouvernement.
Simon sortit sa carte magnétique.
Elle était grise et comportait le logo de Edax, celui de Luxa
et celui de la ville, Batislav. Derrière celle-ci une puce
électronique et une bande magnétique s’incrustait
parfaitement dedans. Il la contempla un instant puis la tendit
poliment au guichetier. L’homme introduit la carte dans une petite
borne à côté de lui et bientôt toutes les
informations contenus dedans apparurent sur un écran. Simon ne
pouvait rien voir. En fait, il ignorait ce qu’il y avait à
l’intérieur. La seule chose qu’il savait, c’est que
cette chose était indispensable et qu’il venait ici tous les
3 ans pour le renouvellement.
Simon attendit patiemment que
l’homme lui redonne sa carte. Cependant il ne semblait pas pressé
de passer au client suivant. Sur l’écran d’ordinateur le
visage figurait en gros plan. A côté, toutes les
informations qui le concernait apparaissaient. L’écran se
mit à clignoter en rouge avec la mention : « refusé ».
Son expression changea du tout au tout. Il demanda à Simon
d’attendre que certaines vérifications spécifiques
soit terminées et l’invita à s’asseoir.
« Que se passe-t-il ?
s’enquit Simon qui commença à douter.
C’était la première
que cela lui arriver. Derrière lui, les autres
s’impatientaient. Tout comme il s’était lui même
impatienté en attendant son tour. Quelques yeux baladeurs
tentèrent de comprendre ce qui se passait, en vain. L’homme
retira la carte et la donna à un collègue qui disparut.
« Une simple formalité,
aucune inquiétude à avoir »
Puis il désigna une porte
en métal qui s’ouvrit toute seule quand Simon se présenta
devant. Le temps qu’il se dirige vers la porte d’un pas hésitant,
une dizaine de personnes état venu et reparti.
La pièce était
sombre, les murs glauques. Une seule chaise pour mobilier. Elle
faisait au plus 5m². Simon ne savait pas comment réagir.
D’un côté il se rassurait en se répétant
qu’il s’agissait d’une simple vérification
administrative. Oui, cela ne pouvais être que cela. Mais de
l’autre il suppliait qui voudrait bien l’entendre de le sortir de
là. Peut-être aurait-il mieux fait de ne pas venir.
Mais non, il ne pouvais pas. Le
résultat aurait été le même. Les forces de
l’ordre serait venus chez lui et l’aurais emmené on ne
sait où. Il secoua la tête de gauche à droite
comme pour chasser toutes ces pensées. Ou plutôt ses
pensées car c’était une faute grave. L’idée
d’enfreindre le règlement ou seulement d’y penser
constituer déjà une entorse à celui-ci. Simon
tenta de se ressaisir et de trouver ce qui clochait.
Un instant il eut la vague
impression qu’il était en train de monter.
Il avait
déménagé !
L’information provenait du fond de sa mémoire. Partiellement
car il ne se souvenait pas quand, mais il en était sûr.
Ce
doit être cela, oui. Sans aucun doute,
pensa-t-il. Le fait de changer de domicile compliquait ardemment
l’obtention d’une nouvelle carte. Il ne réussit à
se convaincre lui même que quelques secondes.
Comment cela était-il
possible. Il habitait dans un appartement avec sa femme et ses
enfants depuis au moins cinq ans, depuis leur mariage. Donc s’il y
avait eu un problème, il aurait vécu cette situation
lors du précédent renouvellement. Il se demanda alors
si sa femme avait pût sans problème faire changer sa
carte.
Il trouvait le temps long. Même
si en réalité il ne savait pas depuis combien de temps
il était assis dans cette cellule de béton. Quelle
importance ! Il finirait bien par en sortir un jour. Il se
concentra de nouveau, oubliant tout ce qu’il avait autour de lui.
Il se vit sautillant sur le pont d’un bateau. Il se pencha par
dessus bord pour apercevoir une mer écarlate. Derrière
lui, les autres membres de l’équipage faisait tous partie de
Edax. Lui même portait sur son uniforme le logo de la société.
Il ouvrit les
yeux. Non
ce n’est pas cela
se dit-il. C’est impossible. Il réalisa alors qu’il
n’avait jamais vu la mer. Il l’avait juste imaginé à
travers des histoires que lui racontait sa mère, bien qu’il
n’aie jamais eu la preuve qu’elle l’aie vu elle aussi. Comment
aurait-il pu voir la mer alors qu’il n’était jamais sortit
de la ville. Il fallait une autorisation écrite du préfet
et du maire et expliquer quelles étaient nos intentions. Il
n’avait jamais fait de demande parce qu’il ne sait même pas
s’il y a quelque chose en dehors de la ville. Il ne doit rien y
avoir puisque personne n’en parle. Cela il en était sûr.