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    Titanic : la vraie histoire

    Ana
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    Message par Ana Mer 12 Oct 2011 - 16:41

    A moins de vivre dans une grotte isolée du monde, vous pensez tout savoir sur le fameux bateau Titanic grâce à un film éponyme qui a laissé une empreinte indéniable dans le cinéma US. Pourtant, si le scénario de ce film reprend des éléments de la réalité, surtout au niveau des décors, de l’ambiance, des différences sociales, des traits caractéristiques d’une époque et de la tragédie en elle-même telle qu’elle fut rapportée par les survivants, on peut se demander, que savons-nous de l’histoire réelle du Titanic ?



    C’est parce que mon père a une passion pour les épaves marines que je connais cette histoire depuis bien plus longtemps que nombre de spectateurs éblouis par le film de James Cameron, aussi ai-je décidé de vous faire profiter du petit rien historique transmis par la passion paternelle….


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    Le Titanic c’est d’abord une histoire de gros sous et d’ambition démesurée, celle de Joseph Bruce Ismay. Né en 1862 en Angleterre, Ismay est dès lors l’héritier désigné de l’affaire familiale bâtie par Thomas Henry Ismay : l’Oceanic Steam Navigation Company, la plus importante firme navale britannique de son temps. Plus connue sous le nom de White Star Line, filiale rachetée en 1867, la compagnie apporte renommée et fortune aux Ismay.


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    Joseph Bruce Ismay



    Le jeune Joseph Bruce est un enfant gâté, envoyé dans les meilleures écoles, voyageant de par le monde pour acquérir les connaissances commerciales et techniques qui assureront la pérennité de l’affaire une fois qu’il en aura hérité. Si son père est très sévère avec lui, ne lui faisant aucun cadeau lors de son apprentissage, se montrant aussi inflexible et désagréable qu’il l’est avec tous ses employés, ce n’est que pour parfaire son caractère d’homme d’affaire. Mais Joseph Bruce n’en retirera qu’une chose : de l’ambition orgueilleuse et une manie d’être dur avec ses subordonnés. Il en deviendra très impopulaire par la suite. Il doit attendre la mort de son père pour hériter de la compagnie en 1899. Il est déjà marié et sûr de son savoir faire. Néanmoins, il doit composer avec la concurrence farouche que représentent l’américain International Mercantile Marine Company de J.P. Morgan (dite IMM Co) et le canadien Cunard Line de Samuel Cunard.


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    Explications : en cette fin du 19e siècle, les traversées en mer étaient le seul moyen « rapide » de rallier les différents continents. Pour des raisons de développement économique passant par l’exploitation des matières premières dans les colonies des puissances européennes, par les vagues d’immigrations vers le nouveau monde, par les échanges commerciaux etc… la navigation s’était beaucoup développée afin d’offrir un transport régulier à chacun, hommes, marchandises… Ce marché a donc naturellement exigé une grande quantité de navires de toutes sortes et attiré les entrepreneurs. La compagnie créée par Ismay père n’était plus seule sur le terrain et perdait même des marchés depuis quelques temps.



    Pour retrouver son train de vie dantesque, la White Star Line de Ismay fils doit trouver un nouveau créneau séduisant. En 1902, il a donc deux idées : dans un premier temps, il négocie le rachat de la White Star Line par son concurrent IMM Co. Cette acquisition se passe bien puisque la réputation de la White Star Line n’est plus à faire : si jusqu’ici IMM Co se contentait d’une clientèle bourgeoise mais de classe moyenne voir de troisième classe, avec la White Star Line, elle est sûre de compter bientôt des milliardaires et la noblesse anglaise parmi ses passagers ! En quelques années, Ismay atteint même les plus hautes fonctions au sein du trust créé, devient directeur et garde le soutien de l’associé J.P Morgan.


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    JP. Morgan, 1902


    L’argent ainsi récupéré (dix fois le chiffre d’affaire annuel de la White Star Line) permet à Ismay de mettre en marche sa seconde idée : la construction de trois gigantesques paquebots de luxe destinés à la transatlantique, copiant les Big Four bâtis sous l’autorité de son père et source du succès de la White star Line auprès des riches. Le but est d’offrir un service régulier aux passagers fortunés en tablant sur le luxe des installations et non sur la rapidité. Ce qui permettra de faire des économies de carburant notables (charbon à l’époque). En 1907, l’idée se précise autour d’un dîner avec le directeur des chantiers navals Harland & Wolff, Lord Pirrie.


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    Ces chantiers sont à Belfast et toutes les constructions navales d’alors y sont concentrées. Ismay et Pirrie décident donc de trois bateaux identiques dans leur conception, l’Olympic, le Titanic et le Gigantic. Le but final sera le confort, le luxe et la sécurité, contrairement aux navires Lusitania et Mauritania de la Cunard qui donnent la priorité à la vitesse.


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    Le Mauritania


    L’architecte en chef de ce faramineux projet est Thomas Andrews, le neveu de Pirrie, aidé d’Alexander Carlisle, un ancien qui partira bientôt en retraite. C’est ce dernier qui reçoit la première salve de refus en totale incohérence avec le projet initial : lorsqu’il propose l’installation d’un nouveau modèle de bossoirs pour permettre le positionnement de 64 bateaux de sauvetage sur l’Olympic, Ismay refuse.

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    Thomas Andrews


    Cette quantité est supérieure à ce qu’exige la réglementation et cela risque d’effrayer les passagers plus qu’autre chose… Même si le nombre de bateaux de sauvetage sera encore supérieur à ce qu’exigent les normes (non mises à jour depuis 1894 et donc sans aucune corrélation logique avec le rapide développement de ce moyen de transport), il sera encore insuffisant face à la très grande quantité de passagers accueillis…


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    Voyez la taille des bonshommes en bas à droite et comparez avec celle du bateau...


    Plus de 14 000 ouvriers irlandais oeuvrent sur la construction des deux premiers géants des mer. Les chantiers navals doivent même être remaniés de sorte que le portique de taille inégalée qui doit servir de squelette temporaire aux navires puisse être monté (256 m de long, 28.50 de large et 52.60 m de haut). Des grues sont mêmes exceptionnellement façonnées pour ce travail et les cales agrandies.


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    L’Olympic fait son voyage inaugural le 14 juin 1911. Ismay est à bord comme le veut la coutume, il remarque des détails qu’il souhaite améliorer sur le Titanic encore en construction et gagne en assurance : en automne, il quitte la direction de IMM Co pour se consacrer à son projet.


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    L’édification du second monstre se poursuit. Si le critère de sécurité a perdu de son éclat avec les bateaux de sauvetage, il reprend du sens avec la mise en place de 14 compartiments étanches sur toute la longueur, en cale. Le principe est qu’avec 2 compartiments inondés n’importe où sur la longueur, 3 les uns à côté des autres ou 4 en proue, le bateau pourra garder sa flottaison. C’est tout nouveau tout beau, surtout si on ajoute que ces compartiments sont condamnables par des portes commandées électriquement depuis le poste de commandement du navire, permettant d’isoler le danger. La coque est constituée de 2 000 plaques de tôles de 3 cm d’épaisseur, rivetées à la main (3 millions de rivets).

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    Sa première glissée sur la mer se passe sous le regard de quelques 100 000 personnes, la plupart des proches de tous les travailleurs du chantier et quelques industriels. On ne baptise pas le Titanic au champagne, de crainte qu’un incident ne vienne heurter les esprits très superstitieux des ouvriers Irlandais…


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    Une fois dans l’eau, le bateau est armé : mécaniciens, électriciens, riveteurs (encore), plombiers, décorateurs, ébénistes, peintres… s’activent pour faire du Titanic le plus luxueux baquebot jamais construit. C’est aussi, de par sa taille, un monstre de nouveautés techniques (quatre cheminées, 29 chaudières spécialement conçues pour le bateau, un tonnage total de 65 000 tonnes…).

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    Salon première classe


    A bord, cabines, cabines suites avec chambres pour les domestiques des passagers les plus riches, un salon et une salle à manger pour chaque classe (donc 6 en tout), piscine, cours de squash, restaurant à la carte pour les 1er classes, fumoir, salon de thé, salon de thé jardin à réserver par les 1er classes, ponts réservés à chacune des trois classes (on ne se mélange pas !), salle de gymnastique, bains turcs… au moins trois ponts sont représentatifs des trois classes et les aménagements leur correspondent.


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    Salle de gym

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    Fumoir 1er classe

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    Cabine 1er classe

    Le luxe suprême est pour la première classe, le confort est pour les secondes classes et l’ordinaire est pour la troisième classe mais il est déjà souvent supérieur à ce que connaissent ces passagers pauvres : eau chaude au robinet, toilettes individuels, boiseries, tapisseries murales…

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    Grand escalier et dôme verrière

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    Salon privé

    Le travail des décorateurs atteint une créativité et une qualité proche du chef d’œuvre artisanal : vitraux, sculptures de bois, bas reliefs dans le bois, luminaires élégants, tapisseries, linges…

    Le voyage inaugural d’abord prévu en mars 1912 est repoussé : l’Olympic a subit une collision avec un croiseur lors de sa 5e traversée, les ouvriers délaissent le Titanic pour le réparer.

    Après une dépense de 1.5 million de livres de l’époque (soit 150 millions de dollars actuels), le Titanic partira le 10 avril.

    Mais il gagne d’abord Liverpool le 24 mars pour y être immatriculé et voir embarquer ses premiers membres d’équipage. Ce sont surtout les chauffeurs, soutiers (78) et personnel et officiers (41) qui embarquent, certains seront recrutés à Southampton (les deux opérateurs radios notamment), lieu de sa première rencontre avec des passagers. Ils leur faut du temps pour faire connaissance avec ce monstre dans lequel ils se perdent souvent. De plus, cette équipe est constituée de gens qui se connaissent à peine ou pas du tout, sont dépassés par les dimensions de leur lieu de travail flottant, ce qui provoque quelques confusions localisées.


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    40.6 tonnes de pommes de terre, 40 000 œufs frais, 20 000 bouteilles de bière de qualité supérieure, 200 barils de farine… Il en faut pour nourrir ce beau monde !

    Dans la nuit du 3 au 4 avril, le Titanic entre dans le port de Southampton. Sur place, il y a une grande effervescence : suite à une grève des ouvriers du charbon, pas mal de bateaux ne partent pas pour l’Amérique aussi les gens qui avaient déjà acheté leur billet se retrouvent avec un changement de dernière minute : ils embarqueront finalement sur le Titanic. La charge de charbon sur le paquebot passe de 1800 tonnes à plus de 5000. Certains sont très satisfaits de cet arrangement : c’est le voyage inaugural, c’est un bateau exceptionnel, d’autres le sont moins : le prix initial de leur billet de première classe les oblige à accepter un billet de seconde classe sur le paquebot de luxe… Et puis d’autres encore n’aiment pas l’idée qu’il n’a encore jamais vraiment pris le large…

    Mais le commandant est Edward Smith, un homme dont la réputation est sans faille et qui part bientôt en retraite, il inspire confiance.


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    Edward Smith


    Bref, 953 passagers montent depuis Southampton et l’équipage se complète, atteignant le chiffre de 889 personnes. Il y a au moins 40 nationalités à bord, beaucoup d’étrangers partent pour une meilleure vie en Amérique mais ne parlent ni ne lisent ou comprennent un mot d’anglais.

    Les noms les plus prestigieux sont sur la liste des embarqués de première classe : John Jacob Astor (milliardaire américain dont le fil a fait plus tard bâtir l’Empire state building), Benjamin Guggenheim (le roi du cuivre et accessoirement le play boy en vue de toute la bonne société US), George Widener (le roi des tramways US), Charles H. Heys (le roi des chemins de fer US), Lady Duff Gordon (riche veuve noble anglaise), Sir Cosmo (riche Lord), Isidor et Ida Strauss (propriétaires et fondateurs du premier grand magasin américain, Macy’s)… Tout ce petit monde commence à créer la légende du Titanic pour la plus grande fierté d’Ismay. Lui-même est à bord bien sûr ainsi que l’architecte Thomas Andrews. L’associé J.P. Morgan devait être du voyage mais il manque le départ de peu…


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    le couple Strauss

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    John Jacob Astor

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    Guggenheim



    Après avoir manqué d’emboutir un autre navire, le Titanic quitte l’Angleterre pour la France. A Cherbourg il doit attendre que l’on fasse la navette depuis le port qui est trop petit pour l’accueillir. De nouveaux passagers embarquent (274) et quelques uns débarquent (24) car c’était là leur destination. Parmi les français, un homme, Mr Navratil s’enregistre sous ce faux nom car il vient d’enlever ses deux fils Michel (4 ans) et Edmond (2 ans) à leur mère, il n’a pas supporté les conditions de leur divorce.


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    Une future célébrité monte également dans les entrailles du Titanic, Margaret Brown (surnommée Molly). Cette femme, bien que milliardaire grâce à son père et son filon américain d’or pur, n’a aucun lien avec la bonne société issue de la noblesse européenne, son attitude et son franc parler lui attirent souvent les critiques, ce dont elle se fiche éperdument.


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    Margaret Brown


    Enfin, le bateau fait une ultime halte le matin du 11 avril, à Queenstown en Irlande, pour accueillir encore 120 passagers, ce qui porte le chiffre à 1 324 personnes (sans oublier les 889 membres d’équipage).



    Nous sommes un jeudi. Les journées se déroulent dans l’effervescence du voyage sur cet immense palais flottant. Le dimanche, le 14 donc, les voyageurs sont même conviés à une messe, un office étant célébré sur chaque pont afin que les gens de classes différentes ne se côtoient pas mais aient leur messe. Ironiquement ou non, l’instant se clôt sur une chant repris en cœur, une prière pour « ceux qui périssent en mer »…


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    La nuit s’annonce froide. Nous sommes en avril certes mais le trajet emprunté par le bateau est dans l’Atlantique nord où dérivent parfois des icebergs qui se sont précocement détachés du pôle. Au cours de la journée, les opérateurs radio reçoivent d’ailleurs plusieurs avis d’autres bateaux qui aperçoivent de la glace ou des iceberg dans cette « région » maritime. Mais les gars travaillant à la transmission et réception des télégrammes sont épuisés : les passagers ne cessent de leur donner du travail, avides de parlementer affaires ou de prévoir les suites de leur voyage une fois à New York. Jack Phillips, envoie même balader le radio du Californian lorsque celui-ci lui raconte qu’ils sont pris dans la glace et que son bateau est immobilisé. Il est 22h55. Refroidi par cette réponse, le radio éteint son outil de travail et part se coucher.


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    Jack Phillips et son second Harold Bride, radios du Titanic


    23h40, beaucoup de passagers sont au lit, dorment ou lisent, certains s’attardent dans le fumoir à parler, jouer aux cartes, boire et bien sûr fumer. Le commandant Smith est lui-même parti prendre un peu de repos, laissant le quart de garde à Charles Lightoller qui l’a ensuite confié à William Murdoch.

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    Murdoch

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    Lightoller

    Deux hommes sont dans le nid de pie, pour repérer la glace à l’avance et prévenir si besoin le poste de commandement. Pourtant, ils ne peuvent se fier qu’à leurs yeux : suite à un changement d’équipage de dernière minute, on a égaré les jumelles ! Depuis le milieu de l’après-midi, le navire file à 41.7 km/h à la demande d’Ismay qui souhaite finalement battre le record de vitesse de l’Olympic, pour l’entrée dans New York le lendemain.

    Soudain, très près du bateau, Frederick Fleet reconnaît un iceberg. Celui-ci est imposant et peu visible car il s’est retourné depuis peu de temps et présente sa face rendue translucide par son séjour dans l’eau. Murdoch est averti, il n’a que quelques secondes pour réagir. Il ordonne de virer à tribord (gauche), de faire marche arrière (une polémique existe aujourd’hui sur la réalité de cette manœuvre) avant de virer vers bâbord. Cette décision bien que conforme aux enseignements de la marine de l’époque scelle le destin du Titanic. Si le navire était entré de plein fouet dans l’iceberg, même endommagé, ses compartiments étanches auraient été utiles, mais en cherchant à contourner l’obstacle, Murdoch envoie le Titanic frôler la glace. La masse du Titanic est telle et sa lancée de 41.7 km/h le pousse tant qu’il met du temps à virer, d’autant que faire marche arrière demande d’abord d’arrêter les machines pour inverser les vapeurs.


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    La glace déchire la coque sous la ligne de flottaison sur plus de 5 compartiments de long. La mer s’engouffre immédiatement. Murdoch actionne le système de fermeture des portes étanches mais il est trop tard. Une majorité des chauffeurs meure, prisonnière. Quelques uns ont la chance de sauver leur peau de justesse. Le capitaine Smith surgit de sa cabine pour demander ce qu’il se passe. Murdoch lui explique et Smith envoie l’officier Joseph Boxhall en reconnaissance des dégâts. Ce dernier jette un œil et revient avec un « ce n’était rien, tout va bien ». Mais il se passe peu de temps avant que les rapports ne commencent à arriver : salle des chaudières inondée, soute et compartiment à bagages également. Thomas Andrews est dépêché pour un nouvel aperçu et son ton est catégorique : le bateau prend l’eau inexorablement, les portes étanches ne montent pas sur la totalité de la hauteur du navire aussi l’eau va-t-elle passer d’un compartiment à un autre profitant de l’enfoncement de l’avant, comme dans un bac à glaçons. Malgré les quatre pompes, le Titanic en a pour une heure, peut-être deux. L’horreur s’impose dans l’esprit des hommes présents (Smith, Ismay, Andrews) : il y a de place dans les bateaux de sauvetage que pour 1 178 personnes alors que l’effectif à bord est de 2 200, personnel maritime compris. Et le temps passe vite : il faut attendre 0h 15 pour que le commandant ordonne de préparer les canots de sauvetage et de lancer un appel de détresse par radio. C’est la première fois que le code S.O.S retentit sur les ondes, il vient d’être inventé pour remplacer de C.Q.D. Jack Phillips et Harold Bride y ajoutent les coordonnées du Titanic. « SOS RMS Titanic, avons heurté iceberg par 41°46’ N 50°14’ O coulons ». La portée du message est de 1000 km.

    Pendant que des mesures désespérées sont prises, beaucoup de passagers dorment parfois encore ! Le Titanic est si massif que l’autre bout du bateau n’a presque pas senti le choc. Seuls les malheureux voyageurs de 3e classe dont les cabines ont déjà commencé à prendre l’eau sortent précipitamment sur leur pont, affaires dans les bras. Les autres appellent le stewart de quart et s’enquièrent de ce bruit étrange, du fait que les machines sont muettes etc… Sans aucun moyen d’alerter les gens (pas de sonnerie d’alarme générale, pas de hauts parleurs, typique de l’époque d’ailleurs) ou le personnel, les infos ne circulent pas ou peu. Et puis il n’y a qu’un pas entre inspirer un sentiment d’urgence et déclencher une panique ingérable… Pendant près de 45 min, les choses se font au ralenti. On envoie du personnel réveiller les gens et leur demander de monter sur le pont principal. En 1er classe, ce sont des demandes discrètes et timides, en seconde classe, le ton est déjà moins diplomate et les 3e classes sont réveillés en sursaut par des hurlements exigeant de chausser leur gilet de sauvetage et se tenir prêt. Beaucoup de ces petites gens ne comprenant pas la langue mettent du temps à réagir. Les gens plus fortunés sortent à contre cœur dans le froid, habillés ou en vêtement de nuit recouvert d‘un manteau. La curiosité l’emporte dans l’esprit de ces gens qui sont habitués à la traversée transatlantique (plus de 50 voyages pour certains) et s’amusent presque qu’il se passe quelque chose !

    On bavarde, on boit même pendant que les marins se débrouillent mal avec les nouveaux bossoirs qu’ils n’ont jamais utilisé, que les ingénieurs et chauffeurs restent à leur poste pour maintenir viable le bateau aussi longtemps que possible tandis que les préposés au courrier entassent des sacs de lettres et de colis afin de protéger aussi longtemps que possible les installations électriques fournissant lumière, chauffage et surtout courant pour les appels radio. Jack Phillips parvient à joindre cinq navires mais tous sont loin. En route vers la Méditerranée, le radio Harold Thomas Cottam, du Carpathia, un petit paquebot attend une réponse d’un tout autre navire, débout depuis 7h du matin s’apprête à laisser tomber pour gagner son lit. Mais il entend l’appel de détresse et demande confirmation avant de se précipiter dans la cabine de son commandant qui est lui-même en tenue de nuit. Aussitôt, le commandant Rostrom réveille les chauffeurs partis dormir et les envoie donner main forte à ceux qui travaillent : il pousse ses chaudières de plus de 10 ans de service pour filer à toute vapeur vers les coordonnées du désastre. Mais il est loin, il annonce qu’il ne sera là que vers 4h du matin…

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    Commandant du Carpathia


    Cette nouvelle ne suffit pas. Jack Phillips s’entête à son poste, dans l’espoir de joindre un bateau plus proche, peut-être celui que certains ont cru apercevoir plus tôt dans la soirée. Sur le pont principal, les premiers bateaux de sauvetage sont prêts et, coutume de mer, on embarque les femmes et les enfants d’abord. Mais surtout les femmes et les enfants de première classe d’abord ! Pire ces gens sont si incrédules face à la situation (le Titanic est réputé insubmersible, et manifestement, il est stable en apparence car sa masse le maintient en position malgré l’envahisseur liquide) qu’ils rechignent à monter. Il fait froid, quel intérêt d’aller faire une balade nocturne sur l’eau, franchement ? Les premiers canots partent presque vides alors qu’ils pouvaient contenir jusqu’à 65 hommes costauds…

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    Soudain, des fusées éclairantes de détresse illuminent la nuit glacée et l’affolement gagne la foule. La bousculade s’amorce mais les marins, Charles Lightoller en tête n’en démordent pas : les femmes et les enfants d’abord. Quelques membres du personnel qui devinent que leur tour sera le dernier et qu’ils mourront sûrement, prennent sur eux d’ouvrir les grilles séparant les ponts des trois classes afin que tous les passagers accèdent au pont principal et donc aux canots. La tension est telle que certains survivants se souviennent avoir entendu des coups de feu, certainement pour faire revenir un calme relatif afin de poursuivre les opérations. Joseph Bruce Ismay profite d’un moment d’inattention pour se glisser dans un canot.

    Des milliardaires tels que Guggenheim (qui voyage seul) ou John Jacob Astor (qui a placé son épouse enceinte dans un canot) acceptent leur sort avec dignité et classe, s’offrant un dernier verre dans la chaleur du fumoir. Jack Phillips reste cramponné à sa radio jusqu’à ce que l’eau grille la salle des batterie à 2h17, de même l’orchestre qui animait les dîner des 1er classes joue sur le pont pour apaiser les gens jusqu’à ce que le Titanic soit si profondément enfoncé dans l’eau par l’avant qu’il devient impossible de rester debout sans s’accrocher à quelque chose. Les canots à peine remplis ne reviennent pas en dépit des ordres hurlés par Smith au mégaphone. Avec la distance, les gens se rendent compte de la terrible réalité et craignent d’être submergés par les autres ou aspirés par le bateau quand il coulera pour de bon. L’eau envahit le pont principal, détruisant tout, emprisonnant ceux qui restent encore dans les murs du navire. Les hommes d’équipage se battent avec un canot pliable, ce sera le dernier à être mis à la mer, et sert surtout à empêcher les quelques marins rescapés de mourir de froid. Car la mer est à – 2° C !

    Dans l’attente d’un secours hypothétique, l’officier Harold Lowe transfert les passagers du canot de sauvetage dont il a la charge et retourne pour chercher des survivants. De son côté Margaret Brown se dispute avec le marin responsable du canot où elle se trouve car elle souhaite aider les gens tombés à l’eau mais il refuse, ne pensant qu’à sa propre sécurité. Elle ne se laisse pas faire, pousse les femmes à prendre les rames et empêche même le marin de les faire chavirer quand celui-ci confond une étoile filante avec une fusée d'un imaginaire sauveteur.

    Le capitaine du Carpathia qui n’a pas ralenti sa cadence en dépit de la couche de glace nocturne qui recouvre la mer n’arrive qu’à 3h 30, plus d’une heure après que la mer ait définitivement pris possession du Titan. Il se place là où aurait dû se trouver le géant mais il ne reste que quelques canots flottant dans la nuit glaciale.

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    On commence à faire embarquer les survivants, certains si tellement frigorifiés qu’on descend une chaise encordée pour les placer dessus tant ils ne peuvent se hisser par leurs propres moyens.


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    Capitaine du Californian


    A 5h passée, le capitaine du Californian s’aperçoit seulement que le Carpathia est là et demande des explications. Il est stupéfié d’avoir manqué les appels de détresse du Titanic qu’il pouvait encore voir de loin la veille au soir, prenant même les fusées de détresse pour des feux d’artifice… ! Lorsqu’il propose de prendre à son bord des rescapés, le commandant Rostrom refuse net, bien que son propre bateau soit alors plein à craquer et qu’il n’ait pas assez de vivres pour tout le monde.

    A 8h 30, le dernier canot est récupéré et l’officier Charles Lightoller est le dernier rescapé à monter à bord. Il s’est cramponné au canot pliable tout le temps. Sur 2 200 personnes, seules 709 sont en vie. Les membres d’équipage sont mort pour 76% d’entre eux, de même que les 3e classes dont 75% ont péri. Si 25% seulement des femmes sont mortes, la part masculine est effroyable avec 82% de morts. Maigre consolation que « seulement » 53 enfants soient décédés sur un total de 109.

    Le Carpathia vogue vers New York, destination la plus proche.


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    Le drame est une secousse sismique. Les progrès rapides de l’homme dans sa maîtrise des technologies nouvelles, sa confiance en un avenir radieux grâce à cela, son sentiment de supériorité face aux éléments fut anéanti pour longtemps. Il y eu enquête et procès, d’autant que les familles fortunées ayant perdu leur proches ou déclaré des possessions précieuses perdues à leur assureur réclamaient une explication, voire une réparation. Aujourd’hui, la science aidant, les témoignages sont complétés (le plus important fut celui du plus gradé en vie Charles Lightoller) et on connaît les causes qui, ajoutées au choc avec la glace, illustrent la catastrophe.

    Premier critère : on maîtrisait peu la fabrication de l’acier, la proportion de soufre et de manganèse n’était pas équilibrée ; ce qui rendait l’acier cassant. Ensuite, l’usage du rivetage (et non de la soudure, le top) fragilisait la structure en cas de choc car les rivets sautaient tout bonnement et simplement, laissant porte ouverte à l’eau.

    Second problème : les restrictions obligatoires concernant la quantité de bateaux de sauvetage proportionnelle à la capacité des navires n’étaient pas adaptées aux gros porteurs et à leur grand quantité de voyageurs.

    Troisième point : le personnel de bord, tout grade confondu, n’avait pas du tout été formé pour ce paquebot. Ses dimensions, ses innovations techniques, son poids, rien n’était adapté à ce qu’ils savaient de leur métiers de marins (lancé à plus de 40 km/h, il aurait fallu 3 km au Titanic pour stopper), aussi la manœuvre de Murdoch fut-elle dévastatrice.

    Quatrième élément : la notion d’ordre de tribord et bâbord a pu jouer un rôle dans le choc avec l’iceberg. En général, sur un bateau, la droite et la gauche sont inversées par rapport au gouvernail (quand on veut aller à gauche on tourne vers la gauche mais le gouvernail fait mouvement à droite et inversement). Demander à aller à tribord n’est pas la même chose que demande de tourner à gauche : est-ce la barre qui va à gauche ou le gouvernail ? On suppose que le barreur a bien interprété les ordres de Murdoch mais il a pu y avoir confusion dans la panique.

    Les règles de la navigation commerciales furent drastiquement changées après ce drame. Une personne embarquée devint égale à une place dans un canot, les conditions de navigation en mer pouvant transporter de la glace furent revues et corrigées, une formation de secours et de manœuvres d’urgence comme la présence de jumelles de secours devinrent obligatoires etc….

    Et bien d’autres éléments que vous pourrez lire sur les liens auxquels je vous renvoie en fin de page.



    Pour l’anecdote…

    Une mère de famille de 2e classe refusa de quitter le Titanic car son bébé avait disparu avec sa nourrice. Paniquée, la jeune femme avait embarquée seule dans un canot, condamnant le reste de la famille à chercher l’enfant jusqu’à leur mort avec le paquebot.

    Un simple homme d’équipage croisa une mère de 3e classe avec ses deux filles dans un couloir. Celle-ci lui demanda où se rendre, quoi faire. Il les accompagna sur le pont principal et voyant que la mère n’avait pas de gilet de sauvetage, lui donna le sien.

    Les enfants du faux Mr Navratil furent surnommés les orphelins du Titanic. Leur photo parue en première page et leur mère française les reconnus deux semaines plus tard avant de venir les chercher. L’ainé lui rapporta que son père lui envoyait ses derniers sentiments d’affection, en dépit de tout ce qui les avait déchiré.

    Ruth Becker Blanchard, 12 ans, avait pris place dans un autre canot que sa mère et ses frère et sœur. Elle ne le retrouva bien vivant que vers 10h du matin le lendemain sur le Carpathia.

    Le fils ainé de John Jacob Astor fit bâtir l’Empire State Building en mémoire de son père.

    Le commandant Rostrom fut récompensé pour son action tandis que le capitaine du Californian fut sévèrement réprimandé par les autorités de la navigation US et anglaise.

    La dernière survivante du Titanic, Millivina Dean, est décédée en 2009.

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    Millivina Dean


    Pour les curieux : un site très complet créé grâce aux témoignages des survivants : http://titanic.pagesperso-orange.fr/



    Aussi : « Titanic, destination désastre » par John P. Eaton et Charles A. Hass, éditions MDV (bon petit livre, juste ce qu’il faut pas mal de détails aussi sur l’enquête).

    Spécialistes édités sur le sujet : Walter Lord, Kenneth Marshall



    L’épave du Titanic fut retrouvée en 1985 par Robert D. Ballard.


    Sources : maritime quest, livre et auteurs précités, Wikipédia, Google image.
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    Message par Iron Ankh Mer 12 Oct 2011 - 19:14

    encore une belle histoire sur la folie des hommes et sur la démesure!
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    Message par Qade Jeu 13 Oct 2011 - 13:15

    On retiendra une prouesse technologique mal maîtriser, l'idiotie sans fin des voyageurs les plus riches, les gros problèmes de sécurité (rivet/nombre de canots,...) mais bon, il aura fallut malheureusement ça pour que des mesures intelligentes soient prises.

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    Message par Ana Jeu 13 Oct 2011 - 13:28

    Comme toujours... c'est typiquement humain!
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    Message par Dawson Jeu 13 Oct 2011 - 19:47

    Titanic... hum ça me dit rien.

    Mais ça ferais un super nom pour un bateau ! ... ou une carte graphique : Asus Titanic Nvidia 700pro...le rendu de l'eau comme vous ne l'avez jamais vu Titanic : la vraie histoire 224795
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    Message par Dragon Kevin Jeu 13 Oct 2011 - 20:25

    Cette histoire de petits bourgeois qui refusent d'embarquer, ou bien les premières embarcations qui partent presque vide en sachant déjà que seul la moitié des passagers pourront embarquer, c'est quand même hallucinant...

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