Titre: Even dead things feel your love
Auteur: Mathieu Guibé
Editeur: Chat Noir
Collection: Griffe Sombre
Sortie: mars 2013
Couverture: Alexandra V Bach
" Au terme de votre vie, à combien estimez-vous le nombre de minutes au cours desquelles vous avez commis une erreur irréparable ? De celle dont les conséquences régissent d’une douloureuse tyrannie vos agissements futurs jusqu’au trépas. Mon acte manqué ne dura pas plus d’une fraction de seconde et pourtant ma mémoire fracturée me renvoie sans cesse à cet instant précis tandis que la course du temps poursuit son inaltérable marche, m’éloignant toujours un peu plus de ce que j’ai perdu ce jour-là. Je me demande si notre dernière heure venue, les remords s’effacent, nous délestant ainsi d’un bagage bien lourd vers l’au-delà ou le néant, peu importe. Puis je me souviens alors qu’il s’agit là d’une délivrance qui m’est interdite, condamné à porter sur mes épaules ce fardeau à travers les âges, à moi qui suis immortel. "
Even dead things feel your love de Mathieu Guibé
Josiah Scarcewillow est un vampire (encore un, oui) un lord dandyloquent qui fuit la ville de Londres et ses fulgurants progrès du XIX ème siècle afin de continuer à mener sa vie anonyme à l’abri de tout chasseur de prime. Il rejoint la demeure familiale, bien décidé à se terrer en compagnie de son majordome, Rudolf, devenu lui aussi créature de la nuit par ses mains, mais c’était sans compter sur l’intrusion de voisins s’adonnant au braconnage sur ses terres qu’ils pensaient abandonnées ni sur sa rencontre fatale avec Abigale. Cette jeune femme possède une vue toute particulière sur la vie: pour elle la beauté ne se trouve pas dans les choses mais dans l’amour qu’on leur porte, ainsi n’est-elle pas effrayée par la mort et quand elle reste auprès de ce renard agonisant et qu’il lui rend cet amour par un geste d’affection Josiah est irrévocablement affecté. S’ensuivent meurtres et amour sincère, amour maudit que rien pas même la cruauté de Josiah n’altère. Amour véritable mettons. Le genre de livre qui à première vue me filerait la nausée.
Et bien non. L’écriture de Mathieu Guibé me rappelle les textes d’antan. Sans posséder leur infernale grandeur il y a ce style, cette profusion de l’intime soutenue par une écriture riche et élégante qui outrepasse la simple description. L’emploi du jeu est hélas tellement employé en ces temps, jusqu’à l’usure et de façon si impersonnelle qu’ici est enfin retranscrite l’intimité des personnages à leur juste valeur c’est à dire comme nulle autre car toute histoire possède un caractère unique que l’écriture se doit de mettre en oeuvre. Cette histoire qui est la leur ne nous est pas racontée sur le fond monocorde d’un disque passé à répétition, elle possède ses propres notes, son propre fil manié avec brio et authenticité, car l’écriture est comme cet amour que porte Abigale pour Josiah, inconditionnel, voué à la Beauté en dehors de toute contrainte morale. La monstruosité de Josiah n’efface en rien son caractère humain. Il se déploie au contraire de façon plus vivace, plus violente à chaque battement.
Even dead things feel your love ne fait pas dans la demi mesure mais ne s’égare pas. Le côté précieux du style, sa touche malsaine et sentimentale ne sombre à aucun moment dans le ridicule, le grotesque ou le niais.
Un réel plaisir de lecture. Aux amateurs de belles lettres.
" …
Ceux qui voient dans les belles choses des significations laides sont corrompus sans être charmants. C’est une faute.
Ceux qui voient dans les belles choses de belles significations sont cultivés. Pour ceux-là, il y a de l’espoir.
Ils sont les élus pour qui les belles choses ne signifient que Beauté.
Il n’existe pas de livre moral ou immoral. Les livres sont bien ou mal écrits. Voilà tout.
..."
Extrait de la Préface au Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde.
Auteur: Mathieu Guibé
Editeur: Chat Noir
Collection: Griffe Sombre
Sortie: mars 2013
Couverture: Alexandra V Bach
" Au terme de votre vie, à combien estimez-vous le nombre de minutes au cours desquelles vous avez commis une erreur irréparable ? De celle dont les conséquences régissent d’une douloureuse tyrannie vos agissements futurs jusqu’au trépas. Mon acte manqué ne dura pas plus d’une fraction de seconde et pourtant ma mémoire fracturée me renvoie sans cesse à cet instant précis tandis que la course du temps poursuit son inaltérable marche, m’éloignant toujours un peu plus de ce que j’ai perdu ce jour-là. Je me demande si notre dernière heure venue, les remords s’effacent, nous délestant ainsi d’un bagage bien lourd vers l’au-delà ou le néant, peu importe. Puis je me souviens alors qu’il s’agit là d’une délivrance qui m’est interdite, condamné à porter sur mes épaules ce fardeau à travers les âges, à moi qui suis immortel. "
Even dead things feel your love de Mathieu Guibé
Josiah Scarcewillow est un vampire (encore un, oui) un lord dandyloquent qui fuit la ville de Londres et ses fulgurants progrès du XIX ème siècle afin de continuer à mener sa vie anonyme à l’abri de tout chasseur de prime. Il rejoint la demeure familiale, bien décidé à se terrer en compagnie de son majordome, Rudolf, devenu lui aussi créature de la nuit par ses mains, mais c’était sans compter sur l’intrusion de voisins s’adonnant au braconnage sur ses terres qu’ils pensaient abandonnées ni sur sa rencontre fatale avec Abigale. Cette jeune femme possède une vue toute particulière sur la vie: pour elle la beauté ne se trouve pas dans les choses mais dans l’amour qu’on leur porte, ainsi n’est-elle pas effrayée par la mort et quand elle reste auprès de ce renard agonisant et qu’il lui rend cet amour par un geste d’affection Josiah est irrévocablement affecté. S’ensuivent meurtres et amour sincère, amour maudit que rien pas même la cruauté de Josiah n’altère. Amour véritable mettons. Le genre de livre qui à première vue me filerait la nausée.
Et bien non. L’écriture de Mathieu Guibé me rappelle les textes d’antan. Sans posséder leur infernale grandeur il y a ce style, cette profusion de l’intime soutenue par une écriture riche et élégante qui outrepasse la simple description. L’emploi du jeu est hélas tellement employé en ces temps, jusqu’à l’usure et de façon si impersonnelle qu’ici est enfin retranscrite l’intimité des personnages à leur juste valeur c’est à dire comme nulle autre car toute histoire possède un caractère unique que l’écriture se doit de mettre en oeuvre. Cette histoire qui est la leur ne nous est pas racontée sur le fond monocorde d’un disque passé à répétition, elle possède ses propres notes, son propre fil manié avec brio et authenticité, car l’écriture est comme cet amour que porte Abigale pour Josiah, inconditionnel, voué à la Beauté en dehors de toute contrainte morale. La monstruosité de Josiah n’efface en rien son caractère humain. Il se déploie au contraire de façon plus vivace, plus violente à chaque battement.
Even dead things feel your love ne fait pas dans la demi mesure mais ne s’égare pas. Le côté précieux du style, sa touche malsaine et sentimentale ne sombre à aucun moment dans le ridicule, le grotesque ou le niais.
Un réel plaisir de lecture. Aux amateurs de belles lettres.
" …
Ceux qui voient dans les belles choses des significations laides sont corrompus sans être charmants. C’est une faute.
Ceux qui voient dans les belles choses de belles significations sont cultivés. Pour ceux-là, il y a de l’espoir.
Ils sont les élus pour qui les belles choses ne signifient que Beauté.
Il n’existe pas de livre moral ou immoral. Les livres sont bien ou mal écrits. Voilà tout.
..."
Extrait de la Préface au Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde.