La 23e édition des 24 Heures du Mans commence le 11 juin 1955 à 16h. A cette époque, les pilotes ne sont pas encore classés par temps réalisé aux essais pour savoir qui partira en tête : les voitures sont garées en épi et les pilotes doivent courir vers elles depuis le stand de leur écurie automobile.
Le résultat cette fois-ci est similaire aux autres : une petite pagaille qui donne l’avantage à Eugenio Castellotti sur Ferrari mais englue Fangio et sa Mercedes dans le peloton. Peu importe, Fangio a plus d’un tour dans son sac et fait une remontée superbe tandis que Ferrari accumule les problèmes techniques et les arrêts au stand. A 18h déjà, Fangio et sa Mercedes se retrouve donc au coude à coude avec l’autre concurrent de taille : la Jaguar pilotée par Mike Hawthorn. Il reste encore 22h de course à effectuer mais les deux hommes s’engagent dans une lutte acharnée de vitesse pour prendre et garder la tête de la course. Ce n’est plus vraiment de l’endurance mais de la vitesse avant tout.
Leur rapidité est telle qu’à 18h25, ils rejoignent déjà la seconde Mercedes en course, conduite par le français Pierre Levegh qui va donc se retrouver avec un tour de retard !
Mais Mike Hawthorn va devoir s’arrêter au stand pour faire le plein alors qu’il est en tête. Il décide de pousser encore son avance et double une Austin-Healey, (190 km/h) voiture de capacité technique, puissance et moteur bien inférieure à sa Jaguar (240 km/h), pour ensuite se rabattre immédiatement devant elle afin de s’engager dans la voie menant aux stands. Surpris, le pilote de l’Austin-Healey qui n’a pas de freins à disque mais à tambour préfère faire un écart sur la gauche pour éviter la Jaguar. Mais il entre alors dans le champ de la Mercedes de Pierre Levegh qui est tout juste derrière lui ! Levegh ne peut éviter de percuter l’arrière de l’Austin-Healey dont la carrosserie sert de tremplin à sa voiture qui s’envole soudain pour aller s’écraser sur le muret qui sépare la piste des tribunes où sont massés les spectateurs. En heurtant le sol, la Mercedes explose, tuant son pilote et envoyant des débris dans les autres tribunes. Le train avant, l’aérofrein, le moteur et autres éléments fauchent littéralement la foule des gradins. 70 morts auxquels s’ajoutent 3 personnes que, dans son élan, l’Austin-Healey va écraser dans les stands.
Fangio, qui était à peine 200 mètres derrière Levegh a vu son équipier lever un bras juste avant que ne se produise la collision, parvient à se frayer un chemin sans heurter aucun des accidentés.
L'accident image par image :
Schéma :
La confusion règne mais la course n’est pas stoppée. Les organisateurs décident que l’information ne doit pas encore être révélée aux pilotes ou au reste des spectateurs placés tout du long du circuit car s’ils venaient à quitter tous en même temps les lieux, les encombrements empêcheraient l’arrivée des secours. Le duel Fangio-Mercedes/Hawthorn-Jaguar se poursuit donc. Mais à 1h du matin, la maison mère de Mercedes ordonne de retirer les voitures de la course, offrant la victoire à Jaguar-Hawthorn.
Fangio
Ce n’est qu’en quittant le circuit que Fangio apprend la réalité. Il comprend que sans le geste de Levegh, il serait sans doute mort lui aussi. De ce jour, il ne participa plus qu’à quelques courses pour maintenir son train de vie.
Pierre Levegh
Après enquête, il ne fut pas retenu de faute à l’encontre de Hawthorn pour son geste (vu comme celui d’un coureur auto) ou de Mercedes pour la manière dont les parties de la voiture accidentée ont tué et blessé des spectateurs. Néanmoins, Hawthorn fut interdit de course pendant un an par Jaguar et trainé dans la boue par les médias.
Mike Hawthorn
Par ailleurs, ce qui fut le plus évident aux yeux des enquêteurs fut la configuration de la piste et des gradins : aucune protection entre les voitures et les gens, de simples barrières de bois ou un talus de terre battue. Sans oublier la grande différence de capacité entre les voitures incriminées : la Austin-Healey roulait au max à 190 km/h tandis que les Mercedes comme les Jaguar atteignaient un régime de 240 km/h. Il est indéniable que le pilote de l’Austin n’aurait rien pu faire d’autre. Des doutes persistèrent concernant Mercedes : la maison mère avait-elle retiré ses voitures avant la fin de la course par pudeur à cause du drame ou bien pour cacher quelque chose ? Ce que l’on sait c’est que Mercedes annonça que la marque se retirait des courses pour une durée inconnue.
Les images filmées ce jour là sont peu explicites tant les choses se sont passées vite :
Le Mans 1955 : La tragédie par MLSLAL
Reportage sur Arte : http://www.arte.tv/fr/mysteres-d-archives/2744840.html
Sources : Wikipédia, Google Images, Dailymotion.